The Left / Flickr / 2012
Dans une tribune conjointe publiée sur le site de « La Croix » le 22 décembre 2022, Jerôme Gavaudan, Président de l’OIAD, et Jean-Claude Samouiller, Président d’Amnesty International France, dénoncent la décision d’expulsion par Israël de l’avocat Salah Hamouri.
Relisez la tribune complète ci-dessous :
« Neuf mois. Cela faisait plus de neuf mois que l’avocat franco-palestinien Salah Hamouri avait été interpellé, puis placé en détention administrative dans une prison israélienne. Sans droit à un procès équitable, sans qu’aucune charge ne lui ait été signifiée, et sous le prétexte qu’il « menacerait la sécurité de la région », il a vu sa peine d’emprisonnement reconduite tous les trois mois par décision d’une cour militaire depuis mars.
Ce dimanche, il a été expulsé d’Israël vers la France, sans autre forme de procès, alors que l’audience devant fixer la date de son expulsion était prévue le 1er janvier. Aujourd’hui, nous demandons aux autorités israéliennes de revenir sur cette décision, en l’autorisant à revenir travailler dans son pays, et vivre sur sa terre natale avec sa famille.
Un dangereux précédent
La révocation de son droit de résidence et son expulsion du territoire israélien, qui pesaient comme une épée de Damoclès sur Salah Hamouri depuis des mois, se sont en effet concrétisées. Or cette dernière décision constitue selon nous une grave violation de la quatrième convention de Genève et un crime de guerre.
L’expulsion de Salah Hamouri établit un dangereux précédent. Elle se fonde sur un amendement à la loi qui autorise le ministère israélien de l’intérieur à expulser les résidents permanents (statut juridique de la majorité des Palestiniens de Jérusalem) si leur « manquement » à l’allégeance à l’État d’Israël est reconnu. Cette mesure entre en contradiction avec le droit international : l’allégeance à la puissance occupante de la part de la population occupée n’est pas requise.
Une vie normale
À plusieurs reprises, les autorités françaises se sont inquiétées de son sort, jusqu’au président Emmanuel Macron, qui s’était enquis de sa situation auprès du ministre israélien des affaires étrangères, Yaïr Lapid, le 22 août dernier. La mobilisation internationale et les efforts de la diplomatie française, dont les positions réitérées ont permis un temps de retarder la prise de ces décisions, sont à saluer.
En réponse à des questions écrites posées par des parlementaires français sur son sort, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères a en effet répété à plusieurs reprises que Salah Hamouri devait « pouvoir mener une vie normale à Jérusalem, où il est né et où il réside », et que « son épouse et ses enfants (devaient obtenir) le droit de s’y rendre pour le retrouver ». Le ministère a d’ailleurs fermement condamné ce week-end « la décision des autorités israéliennes, contraire au droit, d’expulser M. Salah Hamouri vers la France ».
Il n’est pas trop tard pour revenir sur cette décision. L’Observatoire international des avocats en danger (OIAD) travaille avec Amnesty International France pour tenter de faire annuler cette décision et organiser son retour à Jérusalem-Est. En s’obstinant dans cette voie, le gouvernement israélien ne fait en effet qu’entériner une pratique hélas connue dans les autres États autoritaires de la région, à savoir les obstacles à l’exercice du métier d’avocat, et l’expulsion de toute personne susceptible de nuire à l’image du gouvernement. »