COLOMBIE : L’avocat Carlos Enrique Maldonado, victime d’une grave et préoccupante stigmatisation pour avoir défendu des communautés paysannes victimes du conflit armé
27 octobre 2022
Carlos Enrique Maldonado est un avocat spécialisé dans les droits humains, en charge des questions de défense de l’environnement et du territoire au sein de l’association « Equipo Jurídico Pueblos (EJP)». L’EJP est une organisation non gouvernementale à but non lucratif composée d’avocats et de défenseurs des droits humains basée dans la ville de Bucaramanga, à Santander. L’Équipe concentre son travail sur la défense du territoire, de l’environnement et des droits humains des personnes privées de liberté, et lutte contre l’impunité des crimes commis par les agents de l’État colombien dans le nord-est de la Colombie.
Depuis des années, l’EJP a été la cible d’accusations et de commentaires stigmatisants qui ont même conduit à l’ouverture d’une procédure pénale à son encontre, aujourd’hui classée, pour des liens présumés avec le groupe criminel « Ejército de Liberación Nacional (ELN) ».
Ces graves accusations sont aujourd’hui réitérées et ont été étendues au travail de Carlos Enrique Maldonado en tant qu’avocat de deux communautés victimes du conflit armé colombien dans la municipalité de Chimichagua, département de Cesar. Sur le plan administratif, il a été accusé de faire partie d’une organisation criminelle et de commettre le crime d’association de malfaiteurs en assurant la défense judiciaire et administrative de ces communautés paysannes.
Récemment, un média numérique a publié un reportage dans lequel les officiers municipaux ont accusé Carlos de déloyauté procédurale pour avoir défendu les communautés. De même, la ligne éditoriale du reportage stigmatise les liens de Carlos Enrique avec l’Equipo Jurídico Pueblos, et, à son tour, avec l’ELN. Le reportage conclut que les avocats de cette organisation, principalement Carlos, utilisent les communautés paysannes pour envahir les terres privées.
La situation est très préoccupante compte tenu de la présence d’organisations illégales dans la région et de la présence de civils armés sur le terrain, qui, à de multiples occasions, se sont approchés des communautés pour les intimider, même en présence d’avocats tels que Carlos. Ceci est extrêmement inquiétant étant donné que ces commentaires stigmatisants ont historiquement servi de base à ce type d’organisations criminelles pour tuer des défenseurs des droits humains dans les régions les plus reculées de Colombie, comme Chimichagua.
L’Observatoire condamne les accusations et commentaires stigmatisants dont ont fait l’objet Carlos Maldonado et les autres membres de l’Equipo Jurídico Pueblos, qui mettent en danger sa vie et son intégrité physique et constituent un obstacle à l’exercice libre et indépendant de la profession d’avocat, ainsi qu’à l’accès effectif des victimes à la justice.
L’Observatoire appelle les autorités colombiennes à garantir la protection effective de tous les membres de l’Equipo Juridico Pueblos et celle des autres avocats des droits humains en Colombie.
L’Observatoire appelle les autorités colombiennes à veiller à la cessation de toute stigmatisation à l’encontre de l’avocat Carlos Enrique Maldonado et de l’Equipo Jurídico Pueblos.
L’OIAD rappelle aux autorités colombiennes que l’indépendance des avocats est l’un des principaux indicateurs de la santé démocratique et de la consolidation de l’État de droit. Ceci est conforme aux dispositions des Principes de base relatifs au rôle du barreau (1990) :
« Les pouvoirs publics veillent à ce que les avocats a) puissent s’acquitter de toutes leurs fonctions professionnelles sans entrave, intimidation, harcèlement ni ingérence indue; b) puissent voyager et consulter leurs clients librement, dans le pays comme à l’étranger; et c) ne fassent pas l’objet, ni ne soient menacés de poursuites ou de sanctions économiques ou autres pour toutes mesures prises conformément à leurs obligations et normes professionnelles reconnues et à leur déontologie.» (Principe 16).
« Lorsque la sécurité des avocats est menacée dans l’exercice de leurs fonctions, ils doivent être protégés comme il convient par les autorités. » (Principe 17)