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PAKISTAN: Saïf ul-Malook, avocat du couple chrétien condamné à mort pour blasphème

 

Shagufta Kausar et Shafqat Masih, un couple chrétien pakistanais, a été condamné à mort le 4 avril 2014 en vertu de l’article 295-C du code pénal pakistanais.

Le couple marié a été condamné au motif qu’il aurait envoyé des SMS blasphématoires en anglais insultant le prophète Mahomet à un imam local à partir d’un numéro de téléphone enregistré au nom de Shagufta Kausar. Il a cependant été établi que le couple était analphabète et ne parlait pas anglais.

L’audience en appel devant la Haute Cour de Lahore (LHC) devait avoir lieu mercredi 3 juin, mais a finalement été reportée au 22 juin, en raison du ralentissement des procédures dû au coronavirus. Le couple a passé les six dernières années en prison dans l’attente de cet appel de son jugement. Des allégations de torture à l’encontre de Shafqat Masih par des policiers en prison, afin de lui soutirer des aveux, ont été rapportées.

L’avocat Saif ul Malook, qui avait plaidé avec succès le cas d’Asia Bibi devant la Cour suprême, représentera le couple devant la LHC. Il a déclaré dans un entretien à la BBC que les preuves invoquées pour condamner le couple étaient profondément défaillantes. Selon lui, le dossier contre Shagufta Kausar et son mari est encore plus faible que celui contre Asia Bibi.

Saïf ul-Malook a été impliqué dans un certain nombre d’affaires emblématiques de la défense au Pakistan, et notamment l’affaire Asia Bibi. Cette jeune femme chrétienne pakistanaise avait été condamnée à mort pour avoir commis un blasphème.

Alors qu’aucun avocat ne voulait se rapprocher de l’affaire Asia Bibi, l’avocat Saïf ul-Malook a décidé de la défendre devant les tribunaux pakistanais. Il l’a ainsi sauvée, en 2019, d’une pendaison pour blasphème. Asia Bibi, qui était maintenue en détention préventive depuis près de 10 ans, a finalement été autorisée à quitter le Pakistan et est arrivée au Canada le 8 mai 2019.

 

Menaces à l’encontre de l’avocat Saïf ul-Malook

Lorsqu’il obtient l’acquittement d’Asia Bibi, des vagues de protestations ont éclaté dans tout le pays. L’avocat devient alors la cible de menaces de la part de groupes extrémistes religieux. En novembre 2018, il s’exile aux Pays-Bas après de violentes protestations contre la décision de la Cour suprême pakistanaise d’annuler la condamnation à mort d’Asia Bibi.

Malgré l’octroi du statut de réfugié par les autorités néerlandaises, Saïf ul-Malook retourne à Islamabad le 26 janvier 2019 pour défendre Asia Bibi alors qu’elle faisait face à un dernier appel contre la décision de la Cour suprême.

Malgré les nombreuses menaces de mort dont lui et sa famille font l’objet, Saïf ul-Malook a fait preuve d’une immense persévérance et d’un courage incontestable pour défendre les accusés que personne au Pakistan ne veut défendre.

Dans une interview accordée au journal Libération, il déclare : « Quand on défend quelqu’un accusé de blasphème, on est considéré comme un blasphémateur soi-même. Pourtant, je ne fais que mon devoir au regard de la Constitution et de la loi, où il est écrit que tout accusé a droit au respect de ses droits et à un procès équitable ».

La décision qui sera rendue lors de cet appel contre la condamnation du couple chrétien pakistanais pourrait donc sonner le retour des menaces et agressions contre l’avocat.

L’OIAD soutient pleinement le travail de Saïf ul-Malook et les efforts qu’il déploie pour faire respecter les droits de la défense.

A l’occasion de la 10ème Journée Mondiale de l’Avocat en danger, le barreau de Paris et l’OIAD ont accueilli l’avocat Saïf ul-Malook. Il a alors partagé son histoire et son combat pour le respect des droits de la défense au Pakistan, en appelant au soutien de la communauté internationale.

Lors de sa séance du 21 janvier 2020, le Conseil de l’Ordre du barreau de Paris lui a attribué à l’unanimité la qualité d’avocat d’honneur du barreau de Paris pour son travail exceptionnel de défense.

 

Contexte au Pakistan

La loi anti-blasphème pakistanaise est l’une des plus dures au monde, puisqu’elle punit de manière automatique par la peine de mort l’injure au prophète Mahomet. Ces lois introduites en 1986 dans le Code pénal pakistanais (article 295 B, 295 C, 298 A, 298 B, 298 C) ont pour effet de limiter très fortement la liberté de religion et d’expression.

Les avocats qui défendent les personnes accusées de blasphème sont généralement menacés de violences par des groupes et des individus qui veulent rendre justice eux-mêmes. L’avocat étant alors assimilé à la personne dont il assure la défense. La pression de la rue et des responsables religieux s’exerce à tous les niveaux du système judiciaire. Les avocats, juges, policiers ou procureurs sont sous une intense pression et vivent dans la crainte de représailles. Ainsi, trouver un avocat qui accepte de défendre ce type de dossier est une mission particulièrement difficile.

 

Informations sur la situation des avocats au Pakistan.